Boris Tarassiouk, ministrul ucrainean de externe a cerut luni, in cadrul unui interviu acordat cotidianului francez Le Figaro, organizarea a unei conferinte internationale tripartite care sa reuneasca reprezentanti ai tarilor furnizoare, ai tarilor de tranzit si ai tarilor consumatoare de gaze naturale rusesti.

Tarassiouk a atentionat ca Ucraina a fost santajata economic de catre Rusia si a avertizat Europa asupra unei posibile recidive a comportamentului Kremlinului.

Articolul din "Le Figaro":

Tarassiouk : «L'attitude russe est irrationnelle»

Ukraine Dans une interview exclusive au «Figaro», le ministre des Affaires étrangères ukrainien explique les conséquences de la crise du gaz qui a opposé Kiev à Moscou.

Laure Mandeville

[09 janvier 2006]

L'accord signé le 4 janvier par la Russie et l'Ukraine a mis fin à une guerre du gaz qui a révélé l'état polaire de leurs relations.

La crise, qui a suscité une diminution momentanée des approvisionnements en gaz de l'Europe occidentale, a posé la question de la fiabilité du partenaire énergétique russe, entrainant même une polémique sur la capacité de la Russie à assumer son rôle de pays président du G 8 ce semestre.

Le secrétaire d'Etat américain, Condoleeza Rice, a émis des réserves sur la légitimité de la présence de Moscou au sein du groupe des grandes démocraties industrialisées. Moscou a répliqué vertement. Pour Le Figaro, le ministre des Affaires étrangères ukrainien, Boris Tarassiouk, tire les leçons de la crise.

LE FIGARO. – L'accord sur le gaz entre la Russie et l'Ukraine a-t-il mis fin au conflit?

Boris TARASSIOUK. – Il est ardu de garantir l'attitude de la Fédération russe. Nous avons fait face à un chantage économique. Comment appeler autrement une proposition qui multiplie par quatre le prix du gaz sans justification.

Face à cet ultimatum, nous avions même envisagé la possibilité d'utiliser le mémorandum de Budapest, pour faire appel aux pays nucléaires qui se sont engagés à garantir notre sécurité, notamment économique, en échange de la dénucléarisation de l'Ukraine. Heureusement, nous n'en avons pas eu besoin. La Russie a montré qu'elle était un acteur imprévisible.

Cette crise du gaz est devenue une crise entre la Russie et l'Union européenne. Tous les pays consommateurs ont compris qu'ils n'avaient pas de garantie contre une récidive du comportement russe, ce qui les a amenés à prendre des décisions aux conséquences lourdes, sur une possible réorientation de leurs approvisionnements et une diversification de leurs sources d'énergie.

L'Ukraine ne fait pas exception. Le programme stratégique que nous avions prévu de développer d'ici à 2030 va être accéléré. Le président vient de signer un décret pour la création d'une agence qui va s'occuper d'économies d'énergie et essayer de nouer des liens avec les pays européens qui, comme la France, sont leaders dans ce domaine.

Nous appelons par ailleurs à organiser au plus vite une conférence internationale tripartite, réunissant les pays fournisseurs, les pays de transit et les pays consommateurs. Il faut se mettre d'accord sur des règles du jeu.

Comment expliquer la position russe, qui semble irrationnelle au moment où Vladimir Poutine, qui vient de prendre la présidence du G 8, devait montrer sa fiabilité ?

Oui, elle est irrationnelle. Mais il est parfois difficile de trouver une graine de rationalité dans l'attitude du Kremlin. Souvenez-vous de l'affaire de Tuzla (NDLR : petit ilot ukrainien situé au milieu du détroit de Khertch, en mer d'Azov, sur lequel Moscou a brusquement proclamé sa souveraineté en 2004, suscitant une crise entre les deux pays).

Les démarches russes n'ont fait que renforcer les sentiments antirusses en Ukraine et consolider la nation autour du président Iouchtchenko, dont la cote remonte dans les sondages. Parallèlement, les sentiments anti-ukrainiens grandissent en Russie, alimentés par l'ukrainophobie de médias russes contrôlés par le pouvoir.

Cette pression irrationnelle de Moscou s'est exercée alors que la position de l'Ukraine était fondée sur des arguments en béton. Nous avions un accord sur les prix qui courait jusqu'en 2009... Nous étions malgré tout d'accord pour aller vers des prix de marché. La discussion aurait dû être menée dans une atmosphère normale et non dans une ambiance d'hystérie.

La crise va-t-elle accélérer votre candidature à l'Otan ?

La crise du gaz n'est pas liée à notre cheminement vers l'Otan et l'UE. Cependant, je n'exclus pas que dans l'esprit de certains dirigeants russes ce lien existe, en sens inverse.

Certains espéraient peut-être qu'en créant une tension sur le gaz et en déstabilisant l'économie, ils pourraient influencer le résultat des législatives de mars et changer les orientations de la politique extérieure ukrainienne.

La crise va-t-elle améliorer l'image de l'Ukraine au détriment de celle de la Russie en Europe, et notamment en France ?

Les réactions des autorités américaines et européennes montrent que les sympathies dans cette crise sont allées à l'Ukraine. En ce qui concerne la France, nous ne pouvons pas être satisfaits de notre niveau actuel de coopération. Nous comprenons que les liens historiques sont forts avec la Russie. Il ne nous appartient pas de changer cela, ce n'est pas notre désir.

Plus les relations entre la France et la Russie sont bonnes, plus la Russie devient prévisible. Mais nous avons nos propres intérêts. Il me semble que depuis un an, des progrès sensibles ont été faits pour établir des relations plus étroites et plus amicales entre nos pays.

Qu'allez-vous faire pour prévenir une nouvelle crise ?

Nous allons nous lancer dans un programme d'économies d'énergie, car notre économie est un gouffre. Nous allons aussi relancer notre production de gaz naturel. L'Ukraine dispose de réserves importantes en mer Noire, dont les couches facilement accessibles avaient été exploitées dans les années 50. Il faut attirer investissements et technologies pour aller plus profond.

Nous comptons aussi utiliser notre savoir-faire en matière d'extraction de gaz et de pétrole pour développer des accords de partage de production dans des pays tiers comme la Libye, le Kazakhstan ou l'Egypte.

Pour le gaz d'Asie centrale et notamment du Turkménistan, vous restez dépendants de l'acheminement par la Russie.

Nos relations avec le Turkménistan sont bonnes, le président Niyazov viendra à Kiev en visite officielle ce trimestre. Mais il est vrai que nous voulons développer des routes alternatives aux routes russes.